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J'ECRIS ET CHASSE LE HANDICAP
13 mars 2011

N°46le médecin du travail, le patron et le gars

 

Épisode N°46 par François Geoffroy

     J'ai toujours eu une forme d'admiration pour certaines professions.

Ce doit être lié à mon métier d'éducateur auprès de personnes adultes handicapées mentales mais aussi à mes activités syndicales.

   Il s’agit du personnel soignant en général, plus particulièrement les psychiatres et autres personnels de la santé mentale. Les inspecteurs du travail et les médecins du travail sont aussi pour moi des relais importants, faisant partie des acquis sociaux concédés de haute lutte, pour tenter de protéger les salariés vis-à-vis du patronat et de son libéralisme qualifié souvent à juste titre de sauvage..

                         Pour les soignants, j'ai la représentation de métiers difficiles dans la confrontation quotidienne avec la souffrance physique et mentale. Pour les deux professionnels "du travail", j'ai le respect de ces gens qui se doivent d’être les garants des intérêts des salariés et sont donc obligés de se confronter avec le patronat pour lequel ces professionnels sont souvent plus des gêneurs qu'autre chose. Jusqu’à présent, à part un ou deux exemples malheureux rencontrés, telle l’infirmière bourrue et pas disponible à ma demande urgente d’être aidé pour aller aux toilettes, je pouvais parfois être amené à défendre ces professions contre les attaques sournoisement franchouillardes dirigées contre ces « fainéants de fonctionnaires ! »

 

     Ce préambule du gars qui prend le temps d’approcher son sujet avec l’empathie nécessaire étant terminé, le gars va enfin pouvoir nous dire là où il veut en venir…

 J’étais en longue maladie depuis des mois pour les suites douloureuses d’une opération sur une hernie discale. J’étais donc en arrêt de travail ce qui, en l’occurrence, était arrivé à point nommé car j’en avais marre depuis pas mal de temps de ce métier qui partait en niquedouille.

 Ces dernières années n’étaient pas réjouissantes pour l’avenir du secteur social et surtout, dans le cas qui m’intéressait, pour la qualité de la prise en charge en établissements des personnes handicapées.

 

          Les directions d’établissements s’étaient dépêchées d’imiter les cadres supérieurs des multinationales pour employer à leur tour un vocabulaire qu’ils trouvaient bien pratiques pour résoudre leurs problèmes de hiérarchie : Management, Pôles thématiques de réflexion dans l’entreprise…etc. Tous ces termes dissimulent mal le seul objectif de la grande majorité des patrons depuis que le monde est monde, produire le plus vite possible et à moindre coût. Vous ne voyez peut-être pas aisément comment un éducateur peut réussir à « produire plus vite ». Il suffit de savoir que de grandes associations s’occupant d’handicapés physiques ou mentaux de tous âges ont tenté de faire des études sur le temps nécessaire pour,  par exemple « effectuer le lever d’une personne handicapée résidant dans un internat ». Cela peut ne pas sembler outrageusement libéral de vouloir quantifier les minutes utiles et celles qui ne le seraient plus quand un éducateur aide un handicapé à se lever. Sauf que…l’éducateur diplômé (ou le stagiaire sans qualification) mettra ce jour là le temps que la personne à aider décidera. Le chef de service peut être éventuellement derrière l’éducateur avec sa montre sous les yeux, pour vérifier que celui-ci n’en profite pas pour discutailler inutilement avec le résident, ce qui prendrait du temps qu’il n’aurait pas pour les autres. Le lecteur se rendra compte qu’il est probable, tout à fait possible même, que les directions d’établissement adhèrent aux vœux des associations en acceptant sans souci que le résident soit un paquet que l’éducateur pourra manipuler à loisir au lever, ne lui passant qu’un coup de gant sur la figure et lui enfilant son pantalon pour « aller plus vite car on ne servira pas les petits déjeuner après huit heure trente !!! ». Sachant que le coût salarial dans le secteur tertiaire est toujours la part la plus élevée qu’un directeur d’association doit lâcher, cela a un retentissement immédiat sur l’embauche de jeunes pas formés et la dégradation significative des conditions de travail de tous.

Chronométrer le temps dans des instituts de santé, j'en ai fait l'expérience à 17 ans alors que je travaillais dans la maternité d'une clinique privée à Qimper. La religieuse surveillait la toilette des nouveaux-nés exécutée par les aides soignantes, non pas pour s'assurer que tout était fait dans l'art mais pour être certaine que nous ne perdions pas du temps à faire des sourires et autres câlineries aux moutards. Un matin, elle estima que les pinces au nombril faisaient perdre des secondes précieuses, elle nous demanda de les retirer. Une soignante titulaire, moi j'étais là comme stagiaire, objecta que les cordons ombilicaux n'étaient pas cicatrisés et qu'il était trop tôt pour retirer les pinces. Objection non recevable, nous devions retirer les pinces, alles sont encombrantes et nous retardent dans l'exécution des toilettes, c'était un ordre. Nous nous exécutâmes. Le lendemain, la plupart des nouveaux-nés avaient une hernie ombilicale et la religieuse ne protesta pas sur le temps mis à faire les bandages. Ma collègue était outrée par ce qui était arrivé à ces chérubins. Pour reprendre le propos de François, on imagine facilement les effets désastreux de vouloir appliquer les principes de rendements àux soins prodigués à des bébés, des malades physiques ou mentaux.

   

    

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