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J'ECRIS ET CHASSE LE HANDICAP
26 mars 2011

N°51 LE POT DE DEPART

Épisode N°51 

 

Pendant que je rumine sur l’exploration de mon intestin. Encore un truc auquel je me soumets sans enthousiasme. Le résultat du dépistage colorectal lancé au plan national est bon. Pourtant, les infections viennent bien de quelque part et ça fait 25 ans que je connais des colopathies épouvantables, faut sans doute y voir de plus près.

Mais la prévention, je n’y crois guère. C’est toujours quand j’ai eu un truc bien installé, visible à l’œil nu, par un œil exercé qu’on m’a dit : oui, il y a une belle infection. Et je le savais puisque les analyses révélaient la présence du staphylocoque doré. Ce méchant germe n’est ni psychiatrique, ni psychosomatique, encore fallait-il savoir où il se logeait.

C’était bien avant mon accident de la route. Finalement, alors que j’étais très fatiguée et que j’avais refusé les antibiotiques afin de ne pas masquer le foyer infectieux, un moignon cryptogamique en pleine activité, donc jetant de ses spores de méchants germes fut découvert dans un repli de ma gorge. Ablation par chimiothérapie et les furonculoses et les maux de gorge, c’était fini.

Entre la date d’une hémorragie dans le larynx cautérisée avec énergie et le moignon infectieux, quinze ans s’étaient écoulés. Inutile de vous raconter, toutes les démarches pour tirer les choses au clair. Puisque je crachais mauvais, on m’infiltra un tube dans la gorge pour visiter plus bas. Rien, le tube avait masqué le moignon. On me donnait des antibiotiques contre le staphylo. Il se mettait en veilleuse et puis tout recommençait, abcès, furoncles, maux de gorge, sinusite maxillaire. J’ai accepté d’aller voir des psys. qui ont écrit aux docteurs de trouver ce que j’avais mais que je n’étais pas de leur ressort. J’aurais refusé d’y aller, on m’aurait classée comme un peu « fêlée ».

À présent, malgré tous mes désordres organiques, il ne m’est jamais dit que je somatise. Sur mon psy. la seule remarque faite est qu’avec tant de souffrance sur si longtemps, c’était surprenant que je ne fasse pas de dépression. Je supporte mal les déprimés et tous ceux atteints de troubles de la psyché, alors je ne tiens pas du tout à rejoindre « leur famille ».

Et puis, j’avais la réédition de mes poèmes à faire. Pas le temps, d’être chagrine. J’ai encore des projets littéraires mais face au désert culturel, à l’indifférence face à la création, à la décadence du français, je ne suis plus certaine que l’œuvre littéraire mérite mes efforts pour être productive. Rester dans la postérité comme l’espérait Victor Hugo n’a plus de sens aujourd’hui avec toutes les guerres entreprises au bénéfice des multinationales et de la pollution nucléaire pour le bénéfice de l’armement et de la puissance énergétique.

Pendant que je me conditionne à ce colo scanner, François Geoffroy rumine sur son handicap, sa retraite anticipée et une fête organisée pour son départ qui lui laisse quelque dépit. Pour comprendre le goût amer laissé, il a éprouvé le besoin de l’écrire.

 

 Le pot de départ par François Geoffroy

 

   Comme le souvenir laissé par ce pot de départ n’est pas satisfaisant, je choisis d’en écrire l’histoire. Cela ne le rendra pas plus heureux mais je le revisiterai pour le voir peut-être différemment.

     A un an de la retraite, ma vie bascule dans l’invalidité. Je me retrouve avec des séquelles neurologiques liées à un nerf sciatique usé et qui ne cicatrise pas après une intervention chirurgicale. Après une vie de travail manuel où je n’ai pas toujours épargné mon corps, si je suis en butte à ce genre de soucis il n’y a rien d’extraordinaire en soi.

   Je ne peux faire l’impasse sur ma part de responsabilité quant à cette situation qui m’a fait violence en ayant mal au quotidien et par l’arrêt brutal de mes activités physiques.

Je ne suis pas qu’en arrêt de travail, je suis aussi dans la frustration de ne plus pouvoir bricoler autant que j’aimais le faire dans le passé.

   Je n’évoquerai pas ici la responsabilité de mes patrons pour ces conditions de travail souvent difficiles autant physiquement que psychologiquement. Je préciserai seulement que l’employeur est directement responsable aux yeux de la loi de la santé du salarié lors de son temps de travail. Cette responsabilité a fait défaut mais ce n’est pas l’objet de ce récit.

      

   Pour les événements importants de la vie, même lorsqu’ils sont malheureux, il est utile qu’ils se réalisent en laissant à la mémoire le sentiment d’un aboutissement. Pour pouvoir passer à autre chose dans de bonnes conditions, il est connu qu’il est nécessaire de terminer correctement ce qui nous occupait précédemment.

   Je passerai sur les méandres d’une procédure longue et compliquée avant d’être officiellement « remercié », pour arriver dès à présent au premier des derniers rendez-vous avec mes patrons, celui qui me voit assis devant le directeur général dans son bureau, au siège de l’association qui m’emploie depuis plus de 35 ans.

    « J’avais besoin de vous rencontrer pour m’assurer que vous êtes d’accord avec le fait que nous n’avons pas d’autre choix, nous le regrettons d’ailleurs, de devoir vous licencier pour inaptitude du fait de vos problèmes de santé »

   Comme cela faisait des mois que je leur confirmais officiellement par téléphone et courriers que je n’attendais que cela, je réconfortais du mieux que je pouvais le pauvre homme qui vivait avec l’inconfort d’une telle perspective : Virer enfin un syndicaliste dont les activités avaient posé des problèmes pour la gestion sereine d’une entreprise. Celle-ci se faisait fort de mettre en œuvre un discours managérial très en vogue pour casser toute éventuelle contestation.

     Je trouve personnellement que le mot « managérial » comme le sigle « D.R.H » par exemple, fait peur. « Direction du personnel » devait faire trop « personnel », trop humain donc, et un peu ringard pour une association à caractère sociale au top !

   Moi, je n’étais plus au top. Je dois dire aussi que cette invalidité venait paradoxalement valider mon ras le bol de ces années d’un métier d’éducateur mis à mal par ces nouvelles directives « managériales » ! Réussir à faire du chiffre avec de l’action sociale est un challenge que se devait de relever cette association à but non lucratif.

                   Qui dit la fin d’une carrière professionnelle, dit l’aboutissement d’une tranche de vie non négligeable. Voici pourquoi ont été inventé les pots de départ. Rien de mieux en effet que de lever son verre pour boire un coup à la santé de celui qui a fini :

-         De s’épanouir dans une enrichissement personnel grâce à son travail

-         De se lever tous les matins en allant à reculons faire ses heures

-         D’avoir à supporter tous les jours  un chef qui défoule ses frustrations de n’être que chef

-         D’espérer que ça ira mieux demain alors que cela fait des années que cela dure

-         De rêver de changer, se mettre à son compte par exemple et ne jamais l’avoir fait

-         De vivre le travail au jour le jour avec satisfactions et déconvenues

Rayez les mentions inutiles ou gardez un peu de chacune au besoin…

Interlude de ce jour là... à suivre

 

 

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