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J'ECRIS ET CHASSE LE HANDICAP
10 avril 2011

N°54 de la joie d'être mère au divorce

Épisode 54

 

Alors que ma petite fille évoluait bien normalement, je n’allais pas bien. Les aînés étaient nés à onze mois d’intervalle et pendant la grossesse du premier, j’avais fait une pyélite aiguë, après la naissance du second, il fallait voir de plus près du côté rénal. Rien de bien grave, une inflammation de la vessie avec cystites à répétition et du sable dans un rein qui finit par s’évacuer en totalité. Mon bébé était gros et il avait comprimé le rein. A l’époque j’enseignais et j’allais à la Faculté de Strasbourg pour préparer mon CAPES. Après la pyélite, j’y renonçais car le train Mulhouse Strasbourg n’était pas recommandé avec ses secousses et l’hiver rigoureux. Je tenais à avoir un bébé bien portant. Pour mes deux dernières, il fallut enrayer une fausse couche et à six mois de grossesse faire un cerclage sinon, naissance d’une prématurée. Et comme a dit mon gynécologue « Je suis trop dilatée et au moment de l’accouchement, je ne me dilaterai pas ! » Et c’est ce qui s’est produit.

Pour la toute dernière, au huitième mois, j’ai fait, sans m’en rendre compte, un infarctus placentaire. Mon bébé bougeait moins et je tressautais pour le sentir si bien que je ne m’inquiétais pas. J’ai perdu les eaux mais aucune contraction. Je mis de l’ordre dans les tenues des enfants et fis quelques emplettes pour simplifier la vie du père car j’avais le sentiment que la vie se retirait de moi, que je ne survivrai pas. Quand mon mari revint du travail, je lui demandai de me conduire en clinique.

-Ah ! C’est maintenant.

-Oui, sans autre commentaire.

Pour lui, c’était moi qui accouchais, qu’importe le médecin. Donc, il prenait comme un caprice de ma part que je veuille mon vieux gynécologue.

Ce dernier n’était pas content que j’aie tant tardé à venir.

-Je n’ai pas de contractions et je ne voulais pas me retrouver seule dans une chambre comme ça été fait à l’hôpital.

Il interpelle du personnel. Il est 19h. Il veut que cet enfant soit né pour minuit au plus tard. Il répète son propos sur un ton catégorique.

-Mais je n’ai pas de contractions !

-Ne vous en faites pas, tout ira bien !

J’ai été mise en chambre, sous perfusion, avec une aide médicale à proximité qui contrôlait régulièrement l’avancée du travail. A 23h55, elle a téléphoné au gynécologue qui arriva 2mn plus tard avec son manteau par-dessus son pyjama.

-Je savais bien qu’il me faudrait venir. Je restais sur le qui-vive.

D’un geste, il se fit tendre la seringue qui allait m’endormir.

Je rouvrais les yeux, le bébé était né. Il était 0h03.

-         C’est une petite fille

-         J’en ai déjà deux !

-         Mais c’est très bien une fille !

-         Tout à fait, mais mon garçon aurait voulu, pour changer, un petit frère.

Le docteur a disparu derrière un paravent et il réapparaît avec le plateau contenant le placenta. Une grosse poche blanche, de la chair morte.

-         De toute ma carrière je n’ai vu cela. Un infarctus placentaire et un enfant tout à fait en forme. 3kg350.

-         Les autres faisaient 500g. de plus.

-         C’est normal. Elle a vécu sur ses ressources. J’ai bien examiné le placenta et j’ai trouvé deux veinules qui ont maintenu le contact. C’est vraiment incroyable !

Tout ça pour dire que ces deux naissances m’avaient laissé épuisée. Je souffrais dans le bas ventre du côté droit et la douleur gênait les mouvements de la jambe.

Une fois, mon bébé en bonne voie, je consulte le gynécologue. Je lui rappelle qu’il m’avait promis une ligature des trompes puisque je tombe enceinte si facilement et, qu’avec les pilules contraceptives, je n’ai eu que des problèmes. On n’est plus au XIXème siècle !  

-         C’est une opération irréversible. C’est à vous de décider.

-         C’est tout décidé.

Et c’est ainsi que je me suis retrouvée en clinique sans bien comprendre pourquoi tant de questions sur le côté qui faisait mal. Le gynécologue s’est mis de la partie et j’avais la frousse qu’il ait oublié la raison pour laquelle j’étais là, cette intervention n’étant pas tout à fait légale même si je connaissais d’autres femmes y en eut recours.

Quand je me réveillai, mon état général me fit comprendre que je n’avais pas eu une simple ligature. Rien de vraiment grave. Des varices internes dues au poids des bébés et tout avait été bien nettoyé. Ma matrice avait rétréci, comme c’est un muscle qui se dilate, la ligature avait bien été faite.

Je restais très fatiguée physiquement et moralement. Par deux fois, des médecins m’avaient dit de « changer ma vie ». Le deuxième m’a dit « Vous avez compris ? ». J’ai dit « oui » de la tête puisque le premier avait rétorqué à ma question « Qu’est-ce que je dois faire pour aller mieux ? » « Le divorce » et il avait rapidement refermé la porte.

Je m’étais mariée sans amour et j’en souffrais. Le couple créé était mieux que tout ce que j’avais connu. Une mère de personnalité psychotique, une grand-mère devenue ma tutrice qui, après avoir détruit mari et enfants, recommençait avec sa petite fille sauf que je tenais bon, du moins je tentais pour ne pas lui donner le plaisir de sa victoire.

Après mon intervention chirurgicale, je suis allée dans une maison de santé. Deux jours avant la visite de mon mari avec les enfants, je faisais une paralysie. Toutes les fns de semaine étaient un enfer. Un jour, je téléphonai pour qu’il s’abstienne de la visite, j’allais trop mal. Et quand je sus qu’il n’allait pas venir, je rejoignis un groupe de curistes, je parlais et pouvais boire un chocolat chaud. Le dimanche après-midi, je pus faire la plus longue promenade de ma cure sans essoufflement. Il fallait que je mette fin à cette situation, il y allait de ma santé mentale.

Je fis une lettre pour expliquer ma volonté de divorcer et pour qu’il ne me coupe pas la parole comme il avait l’art de la faire et pour qu’il ne me soumette pas à un chantage comme il l’avait déjà fait lorsque j’avais dit ne pas vouloir me marier avec lui. J’avais le sentiment d’être l’instrument qui détruisait une vie et je ne voulais pas être l’auteur d’une vie ravagée. J’avais connu tant de souffrances psychologiques qu’en provoquer à mon tour m’était odieux. Et je ne pouvais m’en ouvrir auprès d’aucuns proches. Ma belle-mère, sans doute, mais il s’agissait de son fils. Je ne pouvais la mettre à contribution. Elle avait senti le problème et me disait « Il vous aime ». C’était vrai mais l’amour est ou n’est pas. Et je ne savais rien de l’amour. Ce que j’écris ici n’était pas clair au moment où je me suis mariée.

Nous sommes allés à la préparation au mariage, séance organisée par la paroisse. En dehors des cléricaux, il y avait un docteur. Et celui-ci affirma que la femme n’éprouvait pas de plaisir mais qu’elle devait en donner à son partenaire. Avec le temps, elle s’habituerait et les relations pourraient devenir de qualités. Je n’ai pas bien cru ce qu’il disait mas là encore, personne pour en parler.

Même avec une lettre pour dire ma décision de divorcer, ce fut très pénible. Mais je connaissais les astuces pour que je renonce à ma décision et je n’ai pas craqué.

Le divorce à l’amable fut engagé, l’avocat était devant son premier cas depuis que la loi était publiée. Mon mari est allé s’installer chez sa mère et récupérera leur appartement une fois ses parents disparues. Il ne voulut jamais avoir son propre appartement, il ne souhaitait pas accueillir ses enfants, « ils étaient trop nombreux » (sic).

Mon corps avait été mis à rude épreuve, j’eus un nombre incroyable de gammaglobuline. Je fus convoqué chez le médecin conseil qui voulait prolonger ma mise en maladie. J’insistais pour reprendre mon travail

-J’ai divorcé et il faut que tout rentre dans l’ordre.

Il accepta sans enthousiasme

-Vous risquez de ne pas tenir le coup et votre dossier reviendra au point de départ.

Je n’envisageais pas retomber dans la maladie. Et ce n’est que bien plus tard que je compris qu’il voulait me mettre en retraite anticipée avec des avantages préservés ce qui ne sera pas le cas quand j’en ferai la demande, tout simplement parce que je réunissais les conditions. 

 

 

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