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J'ECRIS ET CHASSE LE HANDICAP
2 février 2011

N°40 fête d’art et d’artisanat à Digne-les-Bains

Épisode N°40   

L’entrepreneur changea d’attitude quand il mesura l’arnaqueur qu’était le vendeur, dans le monde dignois, il fallait entretenir les mœurs « Je vais t’aider à vider ton porte-monnaie puisque tu n’es pas d’ici » De petit artisan, il était passé à gros entrepreneur en bâtiment. Il avait pléthore d’apprentis car il en tirait avantage fiscalement et plus encore s’il prenait des repris de justice.

Il larguait les apprentis sur un chantier et allait lui-même travailler sur un autre. Les jeunes livrés à eux-mêmes faisaient du n’importe quoi. Et surtout consommer des canettes de bière. Quand j’ai pu accéder à l’étage, j’ai mis presque deux heures avant de pouvoir m’asseoir, il fallait d’abord décaper un siège avant d’y poser ses fesses. Avec mon dictionnaire « Faites tout faire vous-même », j’ai travaillé à restaurer les cuirs et j’y suis parvenue. Les pelles, balais en tous genres et serpillières avaient tous disparus, les serviettes de bain irrécupérables à cause du plâtre,. J’ai appris que le tout avait été abandonné sur les gravas et partis avec eux lorsqu’ils furent chargés dans des camions. Mon mini four et mon micro ondes foutus. Je venais à peine de le réaliser qu’un livreur m’apportait l’un et l’autre de style élémentaire de la part de l’entrepreneur. Il était donc au courant des appareils détruits. Le moulin à café électrique aussi. Pour le reste, je découvris les choses au fil du temps. Une inquiétude me traversa l’esprit, j’allais au cabinet de toilette où dans le tiroir d’un petit meuble, j’avais laissé les bijoux que je portais habituellement et que j’avais posés là alors que je faisais des rangements et je n’avais pu les récupérer avec l’escalier retiré sans m’avertir. Peut-être pour m’inviter à quitter les lieux au plus vite. Ceux qui avaient de la valeur n’y étaient plus bien que bijoux féminins.

Plus tard, je réaliserai qu’un vanity offert par mon aînée avait été forcé et ne pouvait plus se refermer.

J’en informais l’entrepreneur qui me demanda si 1300€ à déduire sur ma dernière facture suffisait. Je n’en savais rien. Le collier m’avait été offert par mon ex-mari. Quand j’ai regardé des styles approchants chez un bijoutier, il était certain que je pouvais en faire mon deuil. Sur la facture définitive, la somme pour m’indemniser était inscrite comme une remise faite par l’entreprise donc une largesse !

Et le temps de filer et d’autres vacances d’arriver et François revenu pour m’aider à tout agencer et me conduire dans la zone artisanale pour acheter du mobilier.

 

J’étais donc installée quand il y eut la fête d’art et d’artisanat de la rue piétonne, bien pratique puisque j’avais pignon sur rue. Mon atelier servi d’entrepôt au matériel des artisanes qui revenaient le lendemain et toutes d’envier mon installation. À l’une d’elles qui ne me paraissait pas commère, je montrais mon problème dans l’arrière-boutique, j’avais une cavité dans le mur, j’avais dû installer une pompe pour absorber l’eau et mettre en place un déshumidificateur pour éviter les moisissures.

- Faut pas vous en faire ! Tout Digne est ainsi. Même que le parking sous terrain en face de la mairie est inutilisable, les voitures deviennent des pédalos. Dans son émission, Julien Courbet a cité cet exemple d’argent jeté par les fenêtres. C’est exagéré, car le Conseil Municipal avait fait faire des études avant de lancer les travaux, donc la Ville de Digne a porté plainte et un procès suit son cours.

Cette artisane habitait une H.L.M. et tout moisissait chez elle. Comme d’autres, elle a alerté les services du logement mais ils ne peuvent rien y faire, de l’eau partout.

Ce qu’elle m’avait dit était exact. À partir du moment où je savais la réalité, on me répondait sinon on me disait « pas de problème », alors j’avais fini par croire être seule à connaître cette situation. Je m’en ouvrais au vendeur, mon assureur. Il me dit qu’il soupçonnait les canalisations mal entretenues depuis qu’une société privée chargée de la gestion de l’eau s’en occupait. La femme de l’assureur travaillait à l’urbanisme de la Ville et savait que la Ville avait voté un budget pour examiner les choses de plus près, c’était programmé pour l’été. Mais ce ne fut pas fait car le passage du Tour de France  cycliste avait représenté une ardoise que le Conseil Régional n’avait pas entièrement couverte et les retombées de cet événement n’ont pas été à la hauteur de celles espérées.

J’avais sympathisé avec bien des exposantes mais sans voiture à cause de ma mauvaise vue, c’était difficile d’entretenir les liens ou de m’associer à des manifestations hors la ville. Le choix de créer un atelier, c’était bien pour qu’on vienne vers moi. J’avais eu bien des acheteurs, surtout une clientèle de passage. De nouveaux arrivants me racontaient leurs difficultés d’installation, on me demandait comment ça s’était passé pour moi. Je n’étais pas très loquace. A une personne, je lui avouais que :

- Je suis très étonnée par ce qu’on me raconte. Je croyais que mon âge et peut-être une apparence de fragilité m’avaient rendu vulnérable. Finalement, je ne m’en suis pas mal sortie.

Et comment m’affirmer avec ma poésie ? Il y avait un poète installé de longue date dans la ville et pour cette petite préfecture, un seul suffisait, d’autant qu’il était instituteur et bien ds enfants fréquentaient son école. J’étais professeur mais j’avais exercé ailleurs. J’avais des prix littéraires, j’étais probablement hors de leur portée d’entendement.

Les gens prirent l’habitude de me commander des acrostiches avec le nom de la personne à qui ils voulaient offrir une planche illustrée. J’avais constitué un imagier et je leur demandais de faire un choix pour que je réponde au mieux à leur attente. J’ai créé ainsi des déclarations de demandes en mariage, des remerciements pour avoir consolé de la perte d’un chat, des célébrations en tous genres, en particulier des anniversaires. L’information de mon savoir-faire se répandait et ma réputation fut celle d’une infographiste. Certains restaient me regarder dessiner à l’ordinateur.

Une fois que je retouchais la silhouette d’un âne, animal mythique en Haute Provence et que je m’y reprenais  à plusieurs fois, on me demanda

- Est-ce que ce n’est pas plus rapide à la main ?

- Si, mais je veux obtenir la parfaite maîtrise du dessin par ordinateur.

Une fois la planche réalisée, je pouvais la tirer autant de fois que cela se justifiait et je passais chaque planche à la pelliculeuse.

Monseigneur Myriel, héros dans « les Misérables » se déplaçait sur un âne. Et Victor Hugo avait sur l’évêché de Digne des propos hilarants, toujours vrais aujourd’hui que je faisais figurer à côté de mon âne. Cette planche m’était demandée par les touristes d’autant que j’habitais dans la rue où avait habité le Monseigneur et une plaque sur la maison concernée le rappelait.

On me demanda aussi des sigles pour organismes en me payant une bouchée de pain. Je rendais service et je voulais me mesurer à moi-même. J'ai arrêté ce service quand j'ai réalisé que ces organismes disposaient du même matériel informatique que moi, mais quelle économie de temps et d'argent de passer par moi.

Il faut faire attention dans cette ville de ne pas trop rendre service sinon votre porte est poussée pour vous demander l’aumône. L’histoire la plus insolite que j’ai vécu est celle-ci.

Un homme, bien abîmé par un ancien travail à l’usine, vient me demander de l’argent pour que sa gamine aille en classe verte. Une de mes ampoules en plafonnier venait de griller. Il me propose d’en mettre une autre. Je regarde  l’escabeau puis l’homme et le trouve plus délabré que moi. Je décline son offre, je n’ai pas envie qu’il tombe de l’escabeau. Il a les bras chargés, il me fait peine, j’avise un caddy à provisions et lui dis que je le lui prête. Il me jure que dans une semaine, jour pour jour, il me le rapportera ainsi que l’argent que je lui ai octroyé en crédit. Une semaine passe, pas de nouvelle.

Je demande à un bistrotier qui lui fait crédit s’il honore ses découverts.

- Pas de problèmes.

Deux semaines passent. Rien. Je m’informe

- Pas de nouvelles et avec le portable, j’ai toujours le répondeur.

- Il est dans sa cabane en montagne et les communications ne passent pas.

Trois semaines et l’énergumène est toujours injoignable. D’autres parlent de lui car il a fait le tour de tous dans la rue pour récupérer de l’argent pour que sa fille adoptive aille en classe verte.

Et un mois plus tard quand on se retrouve au même bistrot, tous ont été appelés par la sœur de l'emprunteur, X a été retrouvé mort dans sa cabane, il nous était demandé ce qu’il nous devait. Personne n’a répondu car chacun s’était dit qu’il prêtait sans garantie et une fin si brutale laissait sans voix. J’étais contente de lui avoir prêté le caddy même s’il ne revenait pas. J’avais trouvé l’homme trop souffrant.

 

Mon expérience dignoise s’est arrêtée. C’est moi qui n’allais pas bien et j’avais besoin du service de grands professeurs en médecine strasbourgeois. J’étais hébergée chez François et notre vie en commun nous plaisait bien. Je mis mon local de Digne en vente par agence. Quelqu’un fit une bonne affaire mais ce n’est pas moi, le nouvel acquéreur fit du local artistique le garage de sa moto.

 

 

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