N°37Un rire incoercible

Le temps passe avec ma fatigue qui ne s’évanouit pas et ma vue brouillée où tout se déforme. Peut-être que  le renouvellement de verres correcteurs arrangeraient les choses. L’astigmatisme s’aggrave avec l’âge, un contrôle ne serait pas inutile, les d sont des o, les t des i et ainsi de suite.. laborieux pour s’y retrouver.

J’ai regardé, il y a quelques jours, sur France 5, le problème sciatique dans le magazine santé. Je n’ai pas été opérée de mon hernie discale, même un grand professeur à l’hôpital de Strasbourg, réputé pour ses interventions et à ce jour, retraité, ne pratiquait cette opération que si elle s’avérait d’une absolue nécessité. L’opération n’a pas donné le résultat escompté pour François Geoffroy. Il existe une autre intervention, l’arthrothèse, une patiente était satisfaite du résultat ce qui n’était pas le cas pour la suppression de son hernie discale. À approfondir pour François, tout cas étant spécifique. Après avoir vu le neurologue, la rhumatologue m’a prescrit une orthèse pour que mon pied gauche ne fasse plus du steppage. Avec le traitement à la cortisone pendant une semaine, je marchais bien normalement. Je ne suis pas allée acheter l’orthèse; puisque le cerveau est doué d’une plasticité, je préférais le rééduquer pour qu’il commande à mon pied des mouvements normaux. Sur ce plan, ça va. Je n’aime pas que mon cerveau n’en fasse qu’à sa tête, il est là pour me servir bien correctement et non pas faire des pitreries. Parce que marcher avec un steppage, c’est faire le pitre. Peut-être que je trouvais sans l’avouer ouvertement que Jean-Paul II faisait le pitre en embrassant le sol après sa descente d’avion. Les islamistes ont dû se dire que le chef des chrétiens avait de drôles de pratiques. Et Marine Le Pen qui se dit catholique, vexée, a prétendu que les Arabes faisaient leurs prières dans la rue. Tour ce branle bas pour un Pape qui voulait embrasser le macadam. Des gens de télé en ont fait un gag. Ils ont montré à Sylvie Vartan le Pape avec une plaque de macadam fraîche collée au nez et tous de s’affairer autour du Saint Père pour tenter de la décoller sans lui faire mal. Sylvie Vartan a été prise d’un fou rire incoercible et moi aussi. J’ai dû filer aux toilettes. Quand je me rappelle la scène, j’en ris encore aujourd’hui.

Mais avoir un projet est une bonne formule pour ne pas végéter dans la douleur. Ecrire pour chasser le handicap ne fonctionne pas vraiment. Je ferais des poèmes, ce serait tout aussi bien. Rester longtemps assise, m’escrimer à voir ne chassent pas le handicap. Disons que mon esprit se focalise plus sur ce que j’écris que sur la douleur, c’est mieux pour le moral. Peut-être que ça m’aide à faire le point, je n’en suis pas assurée, ça devrait être utile à un médecin qui me suit. Car j’ai l’art d’oublier ce qui me déplaît. Quand le médecin demande :

- Ça va ?

- Oui.

Je bougonne un « Oui » plus que je ne l’articule. Je me rappelle avoir bien souffert mais pas à ce moment-là, donc je n’ai rien à dire. Un blizzard a soufflé dans ma tête, tout s’est envolé, rien à dire. Quand mon compagnon François m’accompagne, c’est mieux, il demande que faire dans certaines situations ou bien signale un produit médical manquant, je suis très contente car je n’en aurais pas parlé en râlant une fois rentrée chez moi de mes oublis.